réforme territoriale : 3 mariages, 1 enterrement...

spécial réforme territoriale n°1

A chaque été sa saga... Dans le feuilleton-culte de l’été 2013 « décentralisation acte III » en 2 volets, réalisé sous la houlette de Marylise Lebranchu, on pensait être arrivé au bout du suspense avec l’abrogation de la loi de 2010 créant les conseillers territoriaux et la promulgation de la loi d’affirmation des métropoles en janvier dernier. Il ne manquait qu’une clarification des compétences pour supprimer les doublons en attendant un acte IV...

Mais la « saison 2 », rebaptisée « Réforme territoriale », nous réserve déjà bien des surprises : mariages au sein des régions, des métropoles ou des intercommunalités et disparition programmée des Départements. Depuis le mois de mars, les rebondissements se succèdent à un rythme effréné, les coups de frein alternant avec les coups d’accélérateur. SUD n’en a pas raté un épisode et vous livre le synopsis des prochains mois.

Épisode 1 : le projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral

Ce projet de loi est en cours d’examen. Après adoption en 1re lecture par le Sénat et l’Assemblée nationale, il reviendra en seconde lecture à l’automne.

Les principaux points de la loi :

  • la carte des régions (à ce jour, 13 au lieu de 22) avec désignation des chefs-lieux de région à compter du 1er janvier 2016 ;
  • modification du scrutin régional pour garantir la représentation de chaque département par au moins 1 élu ;
  • report des élections cantonales et régionales en décembre 2015.

Pour la Bretagne, la 1re lecture n’a pas permis de trancher entre les 2 « camps » en présence : les tenants d’une fusion avec la région Pays de Loire et ceux de l’expérimentation d’une assemblée unique de Bretagne. On resterait donc sur le statu-quo, en attendant que nos élus locaux se mettent d’accord ou cèdent sous d’amicales pressions...

Épisode 2 : projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République

Ce projet de loi sera débattu à l’automne. Il revient sur les découpages territoriaux et répartit les compétences :

  • passage d’un seuil de 5 000 habitants à 20 000 habitants pour les EPCI
    (Etablissements Publics de Coopération Intercommunale) : 11 EPCI sont aujourd’hui en-dessous de ce seuil en llle-et-Vilaine - ils servent de base à la configuration de certains de nos services (CDAS et rattachement aux agences) - la nouvelle carte intercommunale prendra effet au plus tard le 1er janvier 2017 ;
  • suppression des Départements (en tant que collectivité) annoncée pour 2020 après dépouillement de nombre de ses compétences via la suppression de la clause de compétence générale ;
  • confirmation de l’objectif de transférer progressivement les compétences du Département vers les Métropoles ;
  • renforcement du rôle de la Région tant pour ses compétences que par l’introduction d’un pouvoir réglementaire.

Épisode 3 : les transferts de compétences

Outre l’avenir de la région Bretagne encore incertain à ce jour, le Département d’Ille-et-Vilaine présente la particularité d’être concerné par un double transfert : vers la Région et vers Rennes Métropole .

Transferts prévus vers la Région :
au 1er janvier 2017

  • les transports interurbains ;
  • les routes (hors périmètre métropolitain) ;
    au 1er septembre 2017
  • les collèges ;
  • les transports scolaires.

Transferts prévus vers Rennes Métropole dans son périmètre territorial :
au 1er janvier 2017

  • les routes
    de manière optionnelle, au 1er janvier 2017
  • par convention ou délégation, 3 parmi les 7 compétences suivantes : Fonds Solidarité Logement (FSL), Programme Départemental d’Insertion (RDI), Fonds d’Aide aux Jeunes (FAJ), prévention spécialisée, polyvalence de secteur, Personnes âgées et action sociale (Centres locaux d’information et de coordination-CLIC), tourisme/culture/ sport.

A défaut d’accord entre Rennes Métropole et le CG35 avant le 1er janvier 2017, transfert de plein droit des 7 compétences.

le changement de DG, c’est maintenant !

Dans une période de fortes incertitudes sur l’avenir des services départementaux et dans l’attente du probable changement de Président du CG 35, le départ de Laurence Quinaut, Directrice Générale des Services, n’est pas une bonne nouvelle. Malgré des divergences profondes et des échanges parfois rugueux, notamment sur la contribution aux textes des DCS sur le travail social ou les politiques managériales générant beaucoup de mal-être au travail, SUD a apprécié le respect, l’écoute et la franchise dans lesquels s’est déroulé le dialogue social ces dernières années. Ils ont, malgré tout, permis des avancées, en particulier sur les carrières des agents de catégorie C, dans un contexte national et local souvent peu favorable.

Des chantiers importants sont en cours ; celui de la mise en œuvre de la réforme territoriale va s’ouvrir. SUD espère qu’Alain Gillouard, dans ses nouvelles fonctions de DGS, saura maintenir cette qualité de relations avec les organisations syndicales pour améliorer les conditions de travail des agents et la qualité du service public aux usagers et assurer les transitions à venir.

Ce qui reste en chantier pour la « saison 3 »

  • la montée en charge des intercommunalités de plus de 20 000 habitants, avec prise de compétence progressive et transferts correspondants.
  • le sort des compétences sociales : transferts aux intercommunalités et/ou recentralisation vers l’Etat (CAF, agences sur le modèle des ARS pour la santé...)
  • le sort des autres compétences du Département confiées par la loi : Archives, Médiathèque...
  • la suppression des départements en tant que collectivité territoriale quand ils seront devenus des coquilles vides...
Sud rencontre les agents

Une centaine d’agents ont participé aux 2 heures d’information syndicale que SUD a organisé à l’auditorium des Archives le 24 juin dernier.

Dans le flot d’annonces successives et parfois contradictoires, l’objectif de SUD était de présenter les enjeux de cette réforme, les différents scénarios possibles en fonction des arbitrages qui précéderont les votes des 2 lois attendus pour l’automne.

Beaucoup d’interrogations parmi les agents qui seront tous impactés à court terme, soit directement par le transfert de leur service, soit plus indirectement par l’évolution des politiques départementales et de l’organisation générale des services pour les compétences non transférées dans l’immédiat. L’inquiétude est particulièrement vive parmi les agents des services dits « supports » qu’ils soient au siège ou dans les agences.

SUD poursuivra le travail d’information des agents par le biais de publications spéciales ou lors de rencontres directes avec les personnels.

Quelles conséquences pour les services départementaux 35 ?

Il est encore trop tôt pour faire un état des lieux exhaustif des changements attendus et de leur échéance. En effet, après le vote des deux lois, va s’engager un cycle de négociations entre le Département et la Région sur les compétences transférées par la loi et les modalités de transfert, voire d’éventuelles délégations là où la loi l’autorisera.

Vont devoir s’engager également des discussions avec Rennes Métropole, notamment sur le secteur social. Si celles-ci ne concernent dans un premier temps, que les CDAS du territoire de Rennes Métropole, il est évident que l’éclatement des missions (polyvalence, insertion, FMI, protection de l’enfance) dans 9 CDAS sur 20 aura des conséquences sur la politique sociale globale du Département.

Par ailleurs, la suppression de la clause de compétence générale oblige le Département à revoir son positionnement sur des politiques non transférées comme, par exemple, l’économie, l’aménagement et l’agriculture. S’il est maintenu dans la version finale, l’angle « solidarité sociale et territoriale » entrouvre quelques possibilités mais avec quelles ressources ?

4 ans après la NOUVOS et le « BBZ » (Budget Base Zéro) de 2010, c’est un nouveau « Big Bang » qui attend les personnels. Les services directs au public ne seront certes pas supprimés et le quotidien des agents ne sera pas bouleversés du jour au lendemain. S’il n’y a donc pas lieu de dramatiser la situation, les discours lénifiants sont tout aussi dangereux.

Sud rencontre le Président

SUD a rencontré le Président le 23 juin sur la réforme territoriale. Exercice périlleux pour lui, entre soutien à la politique gouvernementale et critique d’une méthode indéfendable. Sans faire de « politique-fiction », SUD a rappelé la responsabilité de l’exécutif départemental vis à vis des personnels et des services.

Dans le contexte d’austérité, et contrairement à l’optimisme affiché par le Président, l’harmonisation des régimes de travail suite aux transferts, ne se fera pas par le haut. En particulier, le transfert des contractuels est prévu mais rien ne garantit le maintien de leurs missions et donc leur renouvellement à l’échéance de leur contrat.

Quid également de l’avenir des agences ? Mais là, on touche à un sujet tabou : c’est sans doute depuis les jardins du palais du Luxembourg que le Président suivra le détricotage de la NOUVOS...

Informer, coordonner, défendre

L’organisation administrative de la France, la fiscalité et la question démocratique (mode d’élection des conseils intercommunautaires, éloignement des usagers des lieux de décisions...) concerne l’ensemble des citoyens. En tant que syndicat de la Fonction Publique Territoriale, SUD a en plus la double responsabilité de la qualité du service rendu au public et de la qualité des conditions de travail et de statut des personnels. Les fonctionnaires ne sont ni trop nombreux, ni trop payés ! Alors, qui peut croire que cette réforme apportera des économies d’échelle sans rogner sur la qualité des services ou sans sacrifices supplémentaires demandés aux agents ?

SUD se positionnera clairement dans ce débat sur la réforme territoriale. Notre syndicat a d’ores et déjà engagé des démarches pour rencontrer la Présidence de la Région Bretagne et de Rennes Métropole à la rentrée. Quelle que soit la collectivité, il défendra le maintien du service public, les droits acquis en terme de temps de travail et de rémunérations, le déroulement de carrière des personnels et leurs conditions de travail lors des transferts.

motion adoptée par l’Union syndicale Solidaires réunie en congrès le 5 juin 2014