LPCG n° 167 : « fonctionnaires, stop au ball-trap ! »

éditorial du n° 167

LPCG n° 167

C’est de bon ton ces temps-ci de pointer du doigt les responsables supposés de l’état de désespérance morale et financière du pays (les Roms, les étrangers, les assistés, les profiteurs...) en les présentant comme « le problème » à résoudre.

Empreint d’une réputation de paresseux dans l’imaginaire collectif, le fonctionnaire a toujours été la marotte du comique adepte de la pensée simpliste et du citoyen insatisfait en mal de critique. Et quand il s’agit de traquer les économies pour résoudre une crise pourtant systémique, c’est le coupable idéal des déficits publics (salaires, retraites, effectifs...).

Dans un contexte où la rigueur budgétaire s’érige en dogme, fonctionnaire et efficacité ne feraient pas bon ménage. Trop absents, trop nombreux, trop favorisés, trop gourmands : ce n’est plus du trot mais du galop dont on affuble le fonctionnaire. Si la gestion des finances publiques est l’objet de torture préférée du comptable, l’analyste lui, s’en délecte. Ainsi le dernier rapport de la cour des comptes, en juin 2013, se prononçait ouvertement pour une réduction sévère du nombre de fonctionnaires, le gel du point d’indice et une augmentation du temps de travail des agents.

Le rapport Pêcheur frôle quant à lui l’impopularité en appelant à une stratégie de long terme et une rénovation des grilles salariales pour éviter une fonction publique « sous développée ». Alléger les effectifs en agents apparaît comme la solution incontournable au problème des dépenses publiques avec comme argument imparable la comparaison chiffrée des effectifs modèles d’autres pays. Mais si fonction publique budgétivore il y a, sait-on mesurer pleinement aujourd’hui les conséquences d’un effectif réduit à son plus simple appareil sur la qualité du service public ?.

Les salariés du public connaissent depuis longtemps l’intensification du travail et les contraintes budgétaires et subissent peu à peu la même brutalité d’application managériale que dans le secteur privé. La rationalisation et les transformations organisationnelles au pas de course et guidées par l’obsession « du faire mieux avec moins » engendrent une perte de sens sans précédent de leur métier et une dégradation du service rendu de plus en plus difficile à cautionner. Alors cessons le tir aux pigeons dont les fonctionnaires sont la cible systématique pour que vivent les services publics...